En France, le
fichage des personnes homosexuelles par la police est officiellement interdit
depuis 1981. Mais certaines pratiques policières font encore hausser les
sourcils en 2014: dans un formulaire interne que s’est procuré Le Parisien, les
agents des forces de l’ordre sont invité.e.s à évaluer les établissements de
nuit de la capitale. Plusieurs aspects sont relevés par police: l’interdiction
d’entrée aux mineur.e.s et la «présence de prostituées», de «travestis» ou
«d’hôtesses» dans l’établissement ou à proximité sont signalées à la
préfecture. La «moralité du tenancier», sa «clientèle» et la «tenue générale de
l’établissement» sont également notées et peuvent être qualifiées de
«mauvaise», «médiocre» ou «sans observations».
À en croire
l’en-tête du formulaire, celui-ci est émis par le bureau de la police sanitaire
et de l’environnement, qui dépend de la direction des transports et de la
direction du public. D’après Le Parisien, lorsqu’un établissement demande
exceptionnellement à être ouvert après deux heures du matin, il fait une
demande à la préfecture, qui envoie un exemplaire de ce document au
commissariat le plus proche. Une fois que celui-ci a rempli le formulaire et
l’a renvoyé à la préfecture, cette dernière accède à la requête en fonction des
informations recueillies. D’après une source proche du dossier, ce document ne
serait plus utilisé depuis fin 2012.
Toutefois, la
façon dont ces formulaires ont été remplis et le traitement réservé aux données
collectées restent flous. Sollicitée par la presse, la préfecture a indiqué
qu’elle n’était pas «en mesure d’apporter des informations précises» pour le
moment. «Je suis effaré, a réagi Mickaël Bucheron, président de Flag!,
l’association des policièr.e.s et gendarmes LGBT. Le document ne vise pas
directement les personnes LGBT, mais le mot “travesti” est connoté. La partie
sur la prostitution n’est pas illégitime compte tenu de la législation, mais
que change la présence de travesti.e.s dans un bar? Est-ce qu’on sous-entend
que les travesti.e.s sont des prostitué.e.s en puissance? Nous voulons obtenir
des explications en interne pour comprendre quels sont les tenants et
aboutissants, car ce genre de documents n’a pas lieu d’être. Mais je ne veux pas
attaquer à charge, il faut d’abord voir s’il ne s’agit pas d’un vieux document
qui n’aurait été utilisé que très localement. La question du fichage est
tellement sensible que ça me surprend beaucoup.» Pour l’association, l’enquête
est ouverte.
Ces évaluations
ne sont pas sans rappeler les listes établies en Allemagne sur l’orientation
sexuelle et le statut sérologique des personnes arrêtées.
Source : YAGG.France