Le 19 juillet dernier en Floride, Sasha Garden, une femme
noire transgenre, était retrouvée morte dans son appartement. Elle est la
seizième personne trans’ tuée aux États-Unis cette année.
Elle s’appelait Sasha Garden. C’était une femme, noire et
transgenre. Le 19 juillet dernier, son corps était retrouvé inanimé dans un
lotissement d’appartements. À 27 ans, Sasha Garden s’était faite avocate des
femmes trans’, et coordonnait l’association Miracle of Love, organisation de
lutte contre le VIH et le sida. La jeune femme était aussi travailleuse du
sexe.
« Le 19 juillet 2018, à 5h02, les autorités se sont rendues
au 1633 Holden Avenue à Orlando, après la découverte d’une personne décédée de
nombreuses contusions. Les investigations ont révélé que Sasha Garden a été
victime d’un homicide. » Le rapport de police est formel : Sasha Garden, 27
ans, est au moins la seizième personne trans’ victime d’un meurtre recensé aux
États-Unis cette année. En Floride, elle est la quatrième femme transgenre
non-blanche assassinée depuis le mois de janvier; Celine Walker, Antash’a
English et Cathalina Christina James, toutes originaires de Jacksonville, ont
été tuées d’une balle dans la tête.
At least four black transgender women have been killed this year in Florida, and 2018 is on track to be one of the deadliest years for the LGBTQ community nationwide.
Cathalina Christina James, 24
Sasha Garden, 27
Celine Walker, 36
Antash’a English, 38https://t.co/OlFwBGDty4
Keith Boykin (@keithboykin) July 25, 2018
« Au moins quatre femmes noires transgenres ont été tuées cette année en Floride, et 2018 est en voie de devenir l’une des années les plus meurtrières pour la communauté LGBTQ à travers le monde », a tweeté Keith Boykin, journaliste politique et ancien assistant à la Maison-Blanche.
Politique anti LGBT+
Face à cette situation alarmante et de plus en plus
dangereuse pour les citoyen.ne.s transgenres de Floride, les militants tentent
de se faire entendre des autorités politiques… En vain. Rick Scott, gouverneur
républicain de l’État depuis 2001, a été interpellé par l’association Equality
Florida le 23 juillet dernier : « Le gouverneur a été remarquablement
silencieux quant au nombre de meurtres qui continue d’augmenter. Il doit
prendre la parole, clairement et immédiatement, pour condamner les violences
ciblant les femmes transgenres. »
Incontestablement, Rick Scott n’est pas un fervent défenseur
des droits LGBT+. En 2016, quelques
heures après la tuerie d’Orlando dans une boîte de nuit LGBT, survenue le 12
juin, il donnait une conférence de presse lors de laquelle il n’a pas prononcé
une seule fois les termes « LGBT », « gay » ou « lesbienne ». « À ce stade,
nous ne sommes même pas sûrs qu’il sache prononcer le mot ‘transgenre’ »,
s’inquiète Gina Duncan, l’une des dirigeantes d’Equality Florida. Rick Scott
s’est notamment érigé en grand opposant à l’Obamacare, cette réforme de santé
mise en place par Barack Obama, interdisant toute discrimination envers les
personnes transgenres. Les frais engendrés par les opérations médicales
étaient, entre autre, totalement pris en charge. Depuis l’arrivée au pouvoir de
Donald Trump, les droits civils des personnes trans’ sont de plus en plus mis à
mal.
The Orange County
Sheriff's Office just sent out this note apologizing for how it described a
transgender women who was found dead this week. The agency had initially said
that Sasha Garden was "wearing a wig and dressed as a female." pic.twitter.com/1WKBghJF4X
— Michael Williams
(@michaeldamianw) July 21, 2018
« Le bureau du shérif vient de publier cette lettre en
s’excusant de la manière dont il a décrit la femme transgenre retrouvée morte
cette semaine. Les autorités avaient d’abord déclaré que Sasha Garden ‘portait
une perruque et était habillée en femme »
Heartbreaking .
Upsetting . I am so disgusted by Orlando’s Orange County Sheriff Dept & co
. #SashaGarden your life
mattered , you were loved and won’t be forgotten . #Sayhername
#protectourtranssisters #blacktranswomenmatter #translivesAREhumanlives https://t.co/6mqoIvFZDp
— Janelle Monáe,
Cindi (@JanelleMonae) July 20, 2018
« Déchirant. Bouleversant. Je suis écoeurée par la police
d’Orange County. Sasha Garden, ta vie
comptait, tu étais aimée et ne sera pas oubliée », a tweeté Janelle Monáe, popstar
activiste et ouvertement pansexuelle.
Recrudescence des violences transphobes
Depuis le 5 janvier dernier, au moins 15 autres meurtres de
personnes transgenres ont été recensés aux États-Unis. Toutes étaient des
femmes. Deux étaient blanches. Deux étaient hispaniques. Et 12 étaient noires.
Toutes ont été agressées par des hommes, à coups de poings ou avec des armes à
feu. La plupart étaient originaires du Mississippi, de Georgie, du Texas, du
Nouveau-Mexique, de Floride, de Louisiane, de Caroline du Sud, du Massachusetts
ou d’Ohio… Des Etats majoritairement blancs, républicains, bastions du
conservatisme, où les violences à l’égard des citoyens LGBT+ ne sont pas rares.
Mais d’autres vivaient en Californie ou dans l’état de New-York; une situation
qui laisse penser que la transphobie ne s’arrête désormais plus aux frontières
des Etats les plus réactionnaires.
Dans le monde, 325 meurtres de personnes trans’ ont été
recensés entre le 1er octobre 2016 et le 30 septembre 2017, selon un rapport
publié pour la Journée internationale du souvenir trans (Trans day of
remembrance). C’est 30 cas supplémentaires en comparaison avec l’année
précédente. La majorité des homicides ont eu lieu au Brésil (171), au Mexique
(56) et aux États-Unis (25).
En France, le rapport 2018 publié par SOS homophobie note
que les cas de transphobie sont d’année en année plus nombreux. En 2017,
l’association a reçu 186 témoignages, soit une augmentation de plus de 53%
comparativement à 2016.
« Souvent, les violences à l’encontre des personnes
trans’ passent inaperçues », affirme à TÊTU Clémence Zamora-Cruz, présidente de
l’ONG Transgender Europe et porte-parole de l’Inter-LGBT. Elle souligne par
ailleurs la difficulté pour les personnes trans’ de porter plainte en cas
d’agression, « par peur de devoir justifier leur transidentité ».
S’il n’y a pas eu, à sa connaissance, de meurtres
transphobes en France en 2018, Clémence Zamora-Cruz pointe la maltraitance des
personnes TranS’, qui peut conduire au pire : « Bien qu’on ne peut pas affirmer
ou nier l’existence des meurtres transphobes cette année en France, nous savons
que la transphobie ordinaire fait aussi énormément de victimes car les personnes
trans’ et non-binaires sont poussées au suicide. Plus de 65% des jeunes TranS’
de 16 à 26 ans ont déjà envisagé le suicide et près de 34% d’entre eux auraient
déjà fait une ou plusieurs tentatives, d’après une enquête réalisée en 2009 en
France par HES/MAG », conclue l’activiste. En France aussi, la transphobie tue.
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