dimanche 29 décembre 2019

Agression transphobe à Clermont-Ferrand : «On vit avec la peur, la haine est partout»

Samedi, à Clermont-Ferrand, Nathalie, une femme transgenre, a été rouée de coups de pieds sous une pluie d'insultes. Soutenue par l'association Queer Auvergne, elle a décidé de porter plainte «pour dire stop aux nombreuses violences transphobes».

Nathalie affirme avoir été agressée en raison de sa transidentité, dans le quartier des Vergnes à Clermont-Ferrand 
©PARI-T

 

Nathalie est encore traumatisée. Depuis près d’une semaine, elle revit l’agression transphobe qu’elle a subie samedi. Alors qu’elle fumait une cigarette à l’entrée du domicile d’un ami, dans le quartier des Vergnes à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), une dizaine d’hommes la prennent violemment à partie.

«Au début, ils n’ont pas vu que j’étais trans, ils m’ont sifflée et interpellée comme ils l’auraient fait avec n’importe quelle femme, puis ils se sont aperçus que j’étais transgenre et là les insultes ont commencé : "Sale trans, sale travelo, sale pédé…" 

Un violent coup de pied dans le dos m’a projetée à terre, puis ils se sont acharnés principalement sur mon visage avant de me voler mon sac et les affaires qu’il contenait», raconte-t-elle à Libération.

Choquée, la femme de 53 ans réussit à se relever et à remonter chez son ami. Elle y retrouve une de ses proches, Béryl Esbrayat, trésorière de l’association Queer Auvergne qui lui conseille d’aller «aux urgences pour avoir des éléments médicaux à joindre à une plainte auprès de la police». Nathalie souffre d’une fracture du plancher de l’orbite, elle est couverte de multiples hématomes. 

Du sang s’est accumulé dans ses sinus. Lors de sa consultation, elle se voit prescrire six jours d’ITT par le service de victimologie. Déjà victime d’une agression, il y a deux ans, à coups de pierres dans la banlieue bordelaise, elle a décidé de porter plainte, accompagnée par l’association LGBT+.

«Attention particulière»

Une «démarche personnelle mais surtout militante pour dire stop aux nombreuses violences transphobes, explique la victime. Les personnes homosexuelles et transsexuelles sont obligées de raser les murs pour ne pas subir des remarques ou des violences physiques».

Au commissariat, les deux amies sont surprises de l’accueil qui leur est réservé. «Nous avions reçu l’appel de la préfecture qui nous a affirmé faire le nécessaire, mais là, c’était quand même surprenant. 

D’habitude, quand ils veulent bien faire quelque chose, ce sont de jeunes policiers qui prennent nos plaintes, là c’est le commissaire en personne qui s’est occupé du dossier», explique Béryl Esbrayat, avant de compléter : «Ça ne se passe pas toujours aussi bien. Moi, ils ont refusé de prendre ma plainte il y a deux ans quand j'ai été harclée.» 

La préfecture du Puy-de-Dôme avait en effet déclaré avoir pris contact avec l’association qui accompagne Nathalie et annonçait qu'«une attention particulière» allait «être accordée à l’accueil de cette victime pour son dépôt de plainte».

«Je ne veux pas que mon affaire soit instrumentalisée»

Ce «traitement inhabituel», Nathalie affirme le devoir «à la pression médiatique. Beaucoup de médias se sont intéressés à mon histoire. 

Mais de nombreuses victimes de transphobies n’osent pas médiatiser leurs agressions». Sollicitée par plusieurs médias nationaux, Nathalie n’a cependant «pas donné suite à certaines demandes d’interview»  
«Je ne veux pas que mon affaire soit instrumentalisée à des fins réactionnaires», explique-t-elle. Mais, sur les réseaux sociaux, des internautes «se lâchent et ont des propos haineux sur les habitants de ce quartier».

Une attitude que Béryl Esbrayat dénonce. 
La militante l’assure, la transphobie n’a pas «d’origine sociale ni de couleur. Tous les hommes cisgenres et hétéros peuvent être de potentiels agresseurs, peu importe d’où ils viennent». L’histoire de Nathalie en est la preuve. 

Entre ses deux agressions, Nathalie a connu des discriminations transphobes sur son lieu de travail. «On vit avec la peur, la haine est partout. Après mon coming out et avant même ma transition physique, mes supérieurs hiérarchiques m’ont demandé de ne plus venir sur mon lieu de travail. Ils ont même mis en place une cellule psychologique pour mes collègues, comme si j’avais commis un attentat. C’était ultra-violent.»

Chiffres sous-estimés

Dans son dernier rapport annuel, rendu en mai, l’association SOS Homophobie qualifie l’année 2018 «d’année noire» pour les personnes LGBT et recense 210 cas de transphobie survenus l’année dernière, principalement des insultes (dans deux cas sur cinq), ainsi que des agressions physiques et/ou sexuelles (dans un cas sur dix). Un chiffre largement en deçà de la réalité selon la trésorière de Queer Auvergne : «SOS Homophobie s’appuie sur les seuls chiffres disponibles. Ceux donnés par la police et la justice, mais nous savons qu’à cause des conditions de dépôt de plainte, de la peur voire du sentiment de honte, de nombreuses personnes transgenres ne parlent pas de leurs agressions.»

L’association souhaitait réaliser une étude pour estimer la réalité de la transphobie, mais elle a finalement renoncé, faute de subventions. 

 «En attendant, des cas comme ceux de Nathalie, il y en aura d’autres, partout», ajoute Béryl Esbrayat.



 

samedi 28 décembre 2019

Une militante transgenre de Toronto victime d'un homicide

Julie Berman, 51 ans, est morte dimanche après une agression présumée dans une résidence du centre-ville de Toronto.

Julie Berman, 51 ans, est décédée dimanche après une agression présumée dans une résidence du centre-ville de Toronto. Des amis se souviennent d'elle comme d'une ardente défenseure des droits des personnes transgenres.

 

Des amis lui ont rendu hommage vendredi, se souvenant d'elle comme d'une grande militante pour les droits des personnes transgenres et d'une voix forte qui dénonçait la violence dans sa communauté.

Selon la police, Julie Berman est morte après avoir subi une blessure à la tête, qui selon les enquêteurs a été causée par une arme.

Colin Harnack, un Torontois de 29 ans, qui avait été arrêté sur les lieux de l'agression présumée, est accusé de meurtre au second degré dans cette affaire.

Elle dénonçait la transphobie et faisait de la sensibilisation pour qu'il y ait une meilleure acceptation de la communauté LGBTQ, a affirmé son amie Davina Hader en entrevue à La Presse canadienne.




Selon elle, la femme de 51 ans soutenait depuis 30 ans le 519, un organisme caritatif LGBTQ à Toronto.

Julie a souffert de la violence dans le passé. Il est important de se souvenir de son engagement à parler ouvertement de ce qui se passe dans la communauté trans et de sa capacité à défendre les droits de ses membres, a dit Olivia Nuamah, la directrice générale de Pride Toronto.

Susan Gapka a connu Julie Berman à travers divers événements communautaires comme la Journée du souvenir trans, qui célèbre et honore la vie des personnes identifiées trans qui sont mortes de transphobie, de crimes haineux, d'une maladie, de la toxicomanie, par suicide ou ont été assassinées.

Nous avons été sur la même plateforme pour dénoncer la violence, a-t-elle dit. 






Susan Gapka a ajouté que la mort de Julie Berman prouve qu'il y a encore beaucoup de travail à faire pour défendre les droits des personnes transgenres. 
 
Nous devons parler de cette violence et comment y répondre, a-t-elle affirmé. C'est très important et c'est aussi quelque chose que Julie ferait dans la même situation.
 
Sur Twitter, le ministre des Finances du Canada et député fédéral de Toronto Centre, Bill Morneau, lui a aussi rendu hommage en affirmant que Julie Berman était une cheffe de file pour la communauté LGBTQ2 de Toronto et une amie bien-aimée pour beaucoup. Elle nous manquera et nous nous souviendrons d'elle
 
 
Source Radio-Canada